La commune de Bourrignon se dresse un rocher de 33 mètres de hauteur qu’on appelle la fille de mai. De loin, on dirait qu’elle a une tête de femme coiffée de pins. Les druides y célébraient leur culte. Dans la nuit des temps, une jeune fille orgueilleuse fut changée en ce pilier de pierre. Au début du mois de mai, on y organisait une fête pour le retour du printemps. Les réjouissances duraient jusqu’à l’aube. Un moine qui revenait du Vorbourg s’y arrêta et se mit à chanter avec les autres, à danser et à embrasser ces charmantes jeunes filles. Ses frères du couvent le cherchèrent partout. Ils le retrouvèrent raide mort au pied de ce rocher. Depuis, ce malheureux revient chaque année sur les lieux. Ce n’est pas le moment d’aller vous traîner par là. Il pourrait vous en coûter.
Un forgeron des rives de la Lucelle, qui ne croyait ni en diable ni en Dieu, qui se vantait de n’avoir peur de rien, décida d’y aller, seul et sans son chien qui habituellement l’accompagnait toujours.
« Tout ça, ce sont des racontars, des enfantillages. Cela m’étonnerait qu’il revienne, votre moine. Et puis, s’il revient, vous voyez celui-là, disait-il en désignant son pesant marteau de forgeron, je lui en donnerai un coup dont il ne se réveillera pas. »
C’est lui qui ne s’est pas réveillé. Il disparut sans laisser d’autre trace qu’une tache rouge sang au pied de la fille de mai. Cette tache, vous ne pouvez plus la voir. Au printemps, à la place, il y pousse des anémones.
Comments